Psychologies : le droit de (ne pas) lire
D'accord, j'en ai déjà parlé un peu hier, dans une longue parenthèse. Mais le fait d'en avoir dit quelques mots a amorcé une réflexion dans mon esprit depuis (si si).
Je me suis posé la question de savoir si j'étais vraiment au clair avec le magazine Psychologies.
Le questionnement peut paraître assez dérisoire. Mais au fond, il ne l'est pas pour moi, je m'en suis rendue compte. Voilà donc pourquoi je souhaite clarifier la situation, surtout pour moi, mais vous êtes bien sûr autorisés à lire ;-)
Je disais donc hier, que j'avais longtemps apprécié la lecture du magazine dont il est question (que je persiste à appeler Psychologie magazine, de son ancien titre ...).
J'ajoutais que c'était avant mon entrée en études de psychologie. Et qu'à partir de ce moment-là, la terrible sentence prononcée par certains profs aidant, j'avais banni de mes lectures ce magazine apparemment frivole, simpliste (et donc peu recommandable pour tout futur psychologue qui se respecte).
Je vous avouerai que j'avais à la fois été un peu déçue, triste et vexée d'apprendre le peu d'estime que portaient les gens de la profession à cette lecture qui, à moi, me plaisait bien dans l'ensemble.
Que lui reprochaient les profs, au juste ?
1) Une vulgarisation de la psychologie conduisant à des racourcis contestables voire dangereux
2) Une totale liberté laissée aux auteurs des articles (pas de comité de relecture scientifique), ce qui posait problèmes et questions quant à la fiabilité des informations données
3) Une volonté de mettre l'individu au premier plan en le confortant dans son individualisme ("Moi moi moi")
4) Une tendance à vouloir rendre les gens "adaptés" à la société, conformes, ce que dénonçait fermement l'un de nos professeurs dont je garde un souvenir empli de considération et d'une certaine admiration ...
Reprenons ces critiques, et voyons maintenant ce que l'on peut y répondre :
1) La vulgarisation de la psychologie, c'est pas bien ?
Certes, c'est un problème. Surtout lorsque cela amène à ancrer de fausses connaissances dans l'esprit des gens. La psychanalyse, à cet égard, en a largement fait les frais, après avoir été mise à toutes les sauces et reprise hors contexte par des gens qui n'y connaissaient pas grand chose (ou prenaient des libertés largement contestables).
Mais bon, ne nous leurrons pas, la vulgarisation existe dans bien des domaines. Peut-être est-elle plus préjudiciable en psychologie ... Je ne sais pas. L'important est que les gens conservent leur sens critique. Cela vaut dans ce domaine comme dans les autres. C'est une question de rigueur et d'honnêteté intellectuelles.
En ce qui me concerne, la vulgarisation ne m'embête pas dans la mesure où je lis le magazine pour me détendre. J'ai bien entendu et compris les opinions des profs. J'ai donc retenu que "pour se détendre, se vider la tête", c'était possible (et sans doute pas pire que Elle ou Marie-Claire ;-)
2) Les articles ne sont pas relus et validés par un comité scientifique ?
C'est vrai. En tout cas, c'est ce que nous ont dit nos profs. Je les crois, raisonnablement ;-) Evidemment, dans le cadre de mes études, et pour m'appuyer sur des articles, je n'irai pas citer Psychologies ! À mon sens, c'est aussi logique que de ne pas citer Elle (au hasard :-p). Encore que ... ça dépend du sujet choisi ! Ne nous fermons pas de porte hâtivement !
Bref, dans une perspective sérieuse, Le journal des psychologues est évidemment beaucoup mieux ! Mais pour la détente, il faudra repasser ;-) D'un point de vue scientifique, sérieux et tout ça, c'est drôlement fiable. Par contre, migraineux et non initiés, s'abstenir !
Evidemment, on n'est pas dans la même optique. D'un côté, c'est la détente qui est recherchée (et la légèreté est donc la bienvenue !), de l'autre il est question d'articles scientifiques relus (et souvent refusés plusieurs fois avant publication) par un comité expert. Il est certain qu'on ne joue pas sur le même tableau, et c'est tant mieux !
Bref, à mon sens, le problème majeur à l'égard du public pourrait être la non vérification des informations diffusées dans les articles. Le problème se pose surtout pour les futurs psychologues que nous sommes, puisqu'il ne faudrait pas que l'on prenne pour argent comptant ce que l'on y lit en matière de psychologie. En même temps, je ne suis pas totalement crédule, et j'espère avoir un peu de sens critique me permettant de lire des âneries (qu'il m'appartient d'ailleurs de qualifier comme telles) sans perdre instantanément toutes mes facultés cognitives ! ;-)
3) Une incitation et une valorisation de l'individualisme ?
Peut-être ... et encore, je trouve que cela se discute ! Les autres magazines féminins sont-ils "mieux" sur ce plan ? Et d'abord, le magazine a bien le droit d'avoir la ligne éditoriale qu'il souhaite ... Personne n'est obligé d'acheter ;-) Et comme dirait Pennac dans les droits inaliénables du lecteur, il existe aussi le droit de ne pas tout lire (ce qui m'arrive systématiquement, je ne m'embête pas avec les articles qui ne me tentent pas) voire de ne pas lire du tout !
Ce que je pense aussi, et qui prendrait donc le contre-pied de l'idée avancée, c'est que l'individualisme n'est pas forcément une mauvaise chose. Bon, à nuancer et à expliciter, bien sûr. Mais se préoccuper de soi, de sa santé, de son bien-être, je trouve que c'est une bonne chose. Bien sûr, le risque est là de tomber dans l'excès, et dans les pathologies associées.
Mais on peut aussi voir l'aspect positif des choses : si prendre soin de soi permet d'être bien (ou mieux) dans sa peau, la collectivité (avec en première ligne l'entourage proche, ce qui n'est pas rien) bénéficie de ce bien-être personnel. Quelqu'un qui va bien est mieux à même d'apporter aux autres, que quelqu'un qui va mal ...
C'est largement répété aujourd'hui, mais sans tomber dans l'excès du culte du corps, de l'apparence etc, je trouve tout à fait essentiel de prendre soin de soi avant toute chose. Assurer au moins le minimum pour être en forme.
4) Une tendance à vouloir rendre les gens "adaptés" ?
D'un point de vue psychologique ; du point de vue du prof qui disait ça, et même d'une autre prof qui l'a repris, je comprends tout à fait cette critique, et les réserves qui y sont associées. Tout dépend des principes que l'on a, et de l'éthique que l'on adopte en tant que psychologue. Mais pour les deux profs, psychologues et psychanalystes qui avaient émis cette critique, la chose est claire : le psychanalyste n'est pas là pour rendre le sujet adéquat à son environnement.
Par nature, l'homme (d'un point de vue psychique) n'est pas adapté à son environnement, puisque cela suppose qu'il renonce à sa toute-puissance, qu'il tempère ses envies de jouir de tout, tout de suite ...
C'est sans doute difficile à comprendre vu de l'extérieur, mais dans le cadre d'une cure analytique (par exemple), l'analyste n'est pas là pour dire au patient quoi faire, ni (donc) pour le rendre adapté à la société. Il n'est pas là pour changer le patient, c'est au patient de faire le chemin, pas au psychanalyste de le refaçonner.
Bon, entendons-nous bien, il n'y a rien de vraiment généralisable. Et je ne suis pas la parole divine (quand bien même, faudrait rester critiques ;-)). Je dis ce qu'il me semble avoir compris, avec sans doute des racourcis plus ou moins heureux, et une vue partielle des choses, évidemment ...
Conclusion ?
Ce que je voulais dire, en fin de compte, c'est que malgré toutes les critiques et les réserves qui peuvent être émises à l'égard de ce magazine, je ne rougis pas d'en apprécier la lecture. De façon incomplète, sélective, et tant mieux ... J'y trouve des idées, des informations que je ne lis pas ailleurs, une détente bienvenue. Je me souviens aussi pourquoi c'était le seul magazine que je supportais à une époque : il n'y avait aucune page de mode ! Quel bonheur ! ;-)
De larges domaines sont traités. Certes un peu rapidement et parfois de façon contestable. Mais après tout, est-ce bien grave ? Si un sujet m'intéresse, je peux l'approfondir de mon côté, ce qui me permet d'ailleurs d'avoir accès à une information plus complète, donc moins risquée ... Et après tout, il faut bien prendre des risques parfois ! Celui-là, assurément, n'est pas bien dangereux ;-)